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Théâtre

L'attentat

Dans le cadre de l'événement ...
L'attentat Théâtre

Vincent Hennebicq s’empare du roman de l’écrivain algérien Yasmina Khadra, L’ Attentat. L’histoire d’Amine, chirurgien arabe israélien amené à opérer sans relâche les survivants d’un attentat. Au terme de cette journée aux urgences, il découvre que la kamikaze responsable du drame n’est autre que sa femme.

Calendrier Dates :
  • Mardi 2 avril 2019 à 21h00
  • Mercredi 3 avril 2019 à 19h00
Localisation Lieu : Théâtre de la Paillette, 6 Rue Louis Guilloux
35000 Rennes
Prix : De 8€ à 20€
Site web Site : festival-mythos.com...
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L'interview

L'interview

Yasmina Khadra : “Le vrai terreau du terrorisme, c’est l’humiliation.”

L’auteur de la trilogie Les hirondelles de Kaboul, L’Attentat et Les Sirènes est traduit dans le monde entier. Ce que le jour doit à la nuit et L'Attentat ont été adaptés au cinéma. Infatigable, l'auteur algérien ne cesse de dénoncer le terrorisme islamiste et le fanatisme religieux. Après sa participation au festival Rue des Livres, l'adaptation théâtrale de L’Attentat est présentée à La Paillette dans le cadre de Mythos. Rencontre.

Prendre les deux prénoms de votre épouse pour votre pseudo, c’est un acte d’amour et un acte politique ?

C’est surtout un acte de gratitude. On était en guerre et je n’étais pas sûr d’en sortir vivant. J’ai voulu dire merci à une femme qui a fait de moi ce que je suis. Ça n’est pas politique car tout ce qui est politique est malsain. Moi, je suis dans la générosité et l’amour.

Quand on vous écoute et vous lit, on se dit que finalement tout pourrait être simple, pourquoi vos idées ne sont-elles pas majoritaires ?

Je crois que le monde est plus fasciné par le mensonge, la calomnie et les atrocités que par la vérité. Les gens préfèrent ce qui les émerveille et on ne peut pas être majoritaire dans un monde qui court à sa perte.

Vos écrits sont marqués par vos origines et votre expérience de vie, vous arrive-t-il de vouloir faire abstraction de ce contexte lourd ?

C’est ce que j’ai toujours essayé de faire même si je suis fait de ce qui m’angoisse en tant que citoyen ou père. Je regarde dans les failles et les points forts afin de trouver un espace pour l’espoir et le rêve. Il m’arrive aussi d’aller vers des choses plus légères pour me ressourcer et croire qu’il est possible pour chacun de nous de continuer de rêver.

Vous considérez-vous comme un écrivain engagé ?

Surtout pas, je ne suis pas engagé. Je considère qu’on ne peut pas être engagé sans être dans l’humanitaire. Ceux qui sont engagés sacrifient leur vie pour ceux qui sont dans le besoin et la détresse. Par contre, je suis profondément humain parce que j’ai une très grande sensibilité. Je viens du désert et dans ma tribu, on m’a appris à être attentif au désarroi des autres, à être utile.

Vous écrivez depuis votre plus jeune âge. Qu’est-ce que ça représente pour vous ?

Écrire, c’est me réinventer. Réinventer ma patrie, mon univers, aller ailleurs, échapper à ce qui est réducteur et carcéral. Enfant soldat, chaque page que j’écrivais était une brèche dans les murailles de la caserne et, plus tard, chaque livre que j’écrivais, un tapis volant qui m’emmenait loin de la bêtise humaine.

Pourquoi cette négation de la femme dans la culture arabe ?

Parce que nous n’avons pas le courage de regarder la femme dans les yeux. On a cru qu’elle n’était là que pour notre bon plaisir. Comme de petits seigneurs, on oublie qu’elle a aussi été notre mère, notre sœur ou notre fille. C’est un crétinisme génital. Les sociétés arabes sont phallocratiques. Elles pensent que la vérité est le symbole indétrônable du pouvoir, alors qu’il y a aussi l’intelligence. L’intelligence étant surtout du côté de la femme, ça pose problème.

Quel est le meilleur terreau du terrorisme, le fondamentalisme religieux ou les pouvoirs corrompus ?

Le vrai terreau du terrorisme, c’est l’humiliation. Là où les gens sont opprimés, traînés dans la boue, c’est là que se trouve la patrie de la violence. Le reste, ce ne sont que des outils de la violence puisque tous les intégrismes naissent de la frustration.

Quel rapport entretenez-vous avec l’Algérie ?

Celui qu’entretient n’importe quel citoyen avec sa patrie et qui espère le meilleur pour son peuple. C’est un rapport assez triste puisque c’est un champ de guerre. En 1998, j’ai écrit L’Automne des chimères et je parlais déjà de ce qu’allait devenir l’Algérie. Cette fausse réconciliation, cette terreur anéantit toute volonté de se rebeller. Le terrorisme est un nuage cafardeux qui sera obligé de se dissiper un jour mais ce que je redoute le plus pour mon pays, c’est le renoncement. Le peuple algérien ne croit plus en rien et c’est lamentable de sa part.

Pourtant, vous restez optimiste…

Tous les peuples sont passés par des moments critiques, voire apocalyptiques mais on ne cessera jamais de croire. Aucun malheur n’est éternel, on touche le fond et on remonte. Je suis certain que l’Algérie vit une période d’incubation mais nous allons nous en sortir. C’est une leçon de vie, un jeune peuple qui ne sait pas encore ce qu’il veut, qui n’a pas consolidé ses repères. Chaque blessure est un tatouage. Nous avons manqué de responsabilité.

Où trouvez-vous la foi en l’avenir ?

Dans les yeux de ceux que j’aime. Je me bats pour qu’il y ait toujours un moment solaire et ça m’interdit d’être défaitiste. Je sais reconnaître ce qui est triste et affligeant mais aussi voir ce qui pourrait nous aider à retrouver le sourire. Il ne faut jamais baisser les bras. On a une seule vie et si chacun se rendait compte qu’il est unique et irremplaçable, il pourrait vivre pleinement sa vie.

Pourquoi écrire essentiellement en langue française ?

J’ai toujours voulu écrire en arabe la poésie mais, à 14 ans, quand j’ai rencontré la langue française, elle m’a ébloui. J’ai pensé qu’elle pouvait m’emmener loin. J’étais toujours sermonné par mes professeurs parce que j’étais un petit poète de 14 ans alors qu’un professeur de français m’a fait aimer sa langue. Je dois tout à la langue française, c’est une vraie histoire d’amour. Je ne l’ai pas étudiée, je l’ai aimée.

Dans un festival de littérature, qu’est-ce qui compte pour vous, la rencontre avec les autres écrivains ou avec vos lecteurs ?

Je suis considéré comme un paria et diabolisé dans le milieu littéraire. Ce qui compte pour moi, ce sont les lecteurs. Je vais rencontrer ceux qui me font. J’ai besoin d’aller à leur rencontre, qu’on voit que je suis réel. C’est avec eux que je trouve la force de continuer d’écrire et croire. Je suis fan de mes lecteurs.



Propos recueillis par Patrick Thibault
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